CERTIFICAT DE REMISE EN SERVICE
PROBLÈMES DE SÉCURITÉ DES VOLS
LIÉS AU PROCESSUS DE VÉRIFICATION AESA
1) L'Agence européenne de la
sécurité aérienne (« AESA ») est l'agence de l'UE chargée des
missions réglementaires et exécutives dans le domaine de la sécurité de
l'aviation civile. Elle a rendu obligatoire la réglementation relative à la
sécurité de la maintenance aéronautique, qui figure dans le document Partie-66
de l'AESA du règlement (CE) n° 2042/2003 de la Commission, tel que modifié. (Annexe
1) Le règlement définit son objectif comme « l'établissement
d'exigences techniques et de procédures administratives communes pour assurer
le maintien de la navigabilité des avions (article 1.1) ». Le règlement
établit une définition du « personnel de certification » comme étant
du « personnel responsable de la
remise en service d'un avion ou d'un élément après maintenance »
(article 2(b)). Le personnel de certification doit posséder certaines
qualifications qui ne sont pas exigées des techniciens et mécaniciens
aéronautiques en général, telles que définies à l'article 5(1), et ayant obtenu
une licence conformément au règlement, ces techniciens et mécaniciens
aéronautiques ont droit aux « privilèges
décrits au point 66.A.20(a) » (article 5(3)), et sont alors soumis à
plus de 200 pages de réglementation concernant leur formation et l'exercice de
leurs privilèges.
2) En vertu de l'Annexe 1 (Partie M.A. 801 (a)), les avions
exploités commercialement doivent être entretenus par un organisme visé à la Partie-145
(approuvé conformément à l'article 4) qui exige qu'un « certificat de remise en service (« CRS ») doit être
délivré par un personnel de certification dûment autorisé au nom de l'organisme
lorsqu'il a été vérifié que tous les travaux d'entretien ordonnés ont été
correctement exécutés par l'organisme conformément aux procédures spécifiées au
point 145.A.70, en tenant compte de la disponibilité et de l'utilisation des
données de maintenance spécifiées au point 145.A.45 et qu'il n'y a pas de
non-conformité dont on sait qu'elle met en danger la sécurité du vol ».
3) La Partie-66.A.20 décrit les
privilèges rattachés aux licences de maintenance aéronautique, principalement
en ce qui concerne le droit du titulaire de ces licences de délivrer des
certificats de remise en service pour la maintenance en ligne et le personnel aidant
pour vérifier que tous les travaux de maintenance ont été correctement exécutés
dans le cadre de l'entretien en base. Par implication nécessaire, personne
d'autre qu'un titulaire d'une licence de maintenance aéronautique ne peut
délivrer un certificat de remise en service ou vérifier que la maintenance a
été correctement effectuée (en termes de maintenance en base) et, comme cela a
déjà été noté, aucun avion ne peut être exploité sans CRS.
4) Au sein du système global, l'AESA a créé 3 catégories de
licences de maintenance
aéronautique - A, B et C - et deux systèmes de gestion des tâches, à
savoir l'entretien en base qui implique la mise hors service et
l’immobilisation d'un avion à sa base pour des travaux et des vérifications
plus importantes, et la maintenance en ligne qui est effectuée quotidiennement
comme une simple vérification et pour les défauts de routine pendant les
opérations. Bien que d'autres techniciens et mécaniciens aéronautiques
travaillent sur des avions, ils n'ont pas les mêmes privilèges que les techniciens
et mécaniciens aéronautiques titulaires d'une licence AESA. Les techniciens et
mécaniciens aéronautiques de catégorie A (licence) sont autorisés à effectuer
des tâches simples et limitées, après quoi ils peuvent remettre un avion en
service. Les techniciens et mécaniciens aéronautiques de catégorie A ne peuvent
travailler que sur la maintenance en ligne et ne sont pas autorisés à
superviser ou à certifier le travail d'autres personnes.
5) La licence de catégorie B est le pilier du système. Le
technicien et mécanicien aéronautique de catégorie B (licence) délivre des
certificats de remise en service dans le cadre de la maintenance en ligne,
supervisant et certifiant le travail des techniciens et mécaniciens
aéronautiques non titulaires d'une licence après avoir vérifié le travail
effectué par ces derniers. La licence de catégorie C n'est pertinente que pour
l'entretien en base. Les techniciens et mécaniciens aéronautiques de catégorie
C (licence) délivrent une seule remise en service couvrant les milliers de
tâches individuelles et ils le font après s'être assurés qu'un technicien et
mécanicien aéronautique de catégorie B a vérifié et signé pour chaque tâche. La
classification de technicien et mécanicien aéronautique de catégorie C a été
créé pour permettre la production d'un seul certificat couvrant tous les
travaux effectués sur l'avion. Pour différencier les techniciens et mécaniciens
aéronautiques des catégories C et B qui travaillent à l'entretien de base, les techniciens
et mécaniciens aéronautiques de la catégorie B sont appelés personnel de
certification sur la ligne, mais soutient le personnel au sein de la base.
6) L'AESA a conçu un système pour s'assurer que l'entretien est
correctement effectué en créant une classification de techniciens et
mécaniciens aéronautiques qui, par leur qualification et leur expérience, sont
agréés par l'autorité nationale de navigabilité en tant que « personnel de certification ».
Ces techniciens et mécaniciens aéronautiques ont la responsabilité de s'assurer
que les travaux de maintenance effectués sur les avions ont été correctement
exécutés ; ils sont exposés à une responsabilité civile et pénale personnelle ;
et l'AESA a déclaré que ce personnel doit s'acquitter de ses tâches en « vérifiant » que les travaux
effectués par d'autres techniciens et mécaniciens aéronautiques travaillant sur
un avion ont été correctement exécutés.
Cette charge repose sur les techniciens et mécaniciens aéronautiques de
catégorie B, tant pour l'entretien de base que pour l'entretien en ligne.
7) Dans la pratique, le personnel de certification doit disposer
d'un certain pouvoir discrétionnaire quant à l'étendue et à la manière dont il
vérifie que le travail a été correctement exécuté. Cette discrétion a été
décrite utilement par le responsable de la politique sur la navigabilité de
l'autorité de l'aviation civile, comme suit :
« La
mesure dans laquelle la personne qui délivre le CRS doit vérifier
personnellement que le travail a été correctement exécuté doit être basée sur
la compétence des personnes impliquées dans l'accomplissement (de) la tâche. Dans
le cas de tâches complexes, cela peut nécessiter des inspections au fur et à mesure
que les travaux avancent. La personne qui délivre le CRS peut donc réduire
l'étendue de sa participation dans une certaine mesure lorsque les personnes
qui accomplissent les tâches sont autorisées à signer la vérification en cours,
mais pas au point où le certificateur est incapable (de) vérifier par ses
propres actions qu'elle a été correctement exécutée. Cela signifie en réalité
que l'émission d'un CRS est destinée à être un processus de contrôle de la
qualité et ne peut donc pas être considérée comme une simple question
administrative ». (Annexe 2)
8) Malgré cet éclaircissement utile du sens et de l'intention de
la « vérification », de
nombreuses autorités en Europe et celles réglementées par l'AESA en dehors de
l’Europe ont choisi de redéfinir la « vérification » afin de la
limiter exclusivement à l'exercice administratif de « cocher des cases » qui consiste à s'assurer,
exclusivement par référence à la documentation et même si elle n'est signée que
par des techniciens et mécaniciens aéronautiques non licenciés, que les tâches
de maintenance ont été effectuées de manière appropriée et selon les besoins. Il
est difficile de comprendre comment ces autorités ont conclu que les documents
de vérification signés par des techniciens et mécaniciens aéronautiques qui ne
sont pas eux-mêmes autorisés à vérifier l'achèvement des travaux aux fins de remise
en service peuvent être interprétés comme une vérification conformément aux
modalités de la Partie-145. L'Oxford English Dictionary définit la vérification
au sens du règlement comme « l'action
de démontrer ou de prouver la véracité ou la légitimité au moyen d'éléments de
preuve ». Il convient de souligner ici que le règlement stipule que la
vérification porte sur « toute la maintenance nécessaire », et
explicitement pas sur tous les registres de la maintenance nécessaire, ce qui
constitue la description du processus retenue par un nombre croissant
d'autorités nationales européennes. Un exercice administratif réduit à « cocher des cases » de cette
nature rendrait difficilement convenable le fait que le technicien et mécanicien
aéronautique certificateur devienne personnellement et légalement responsable
de l'approbation de la maintenance (validation du CRS), et il ne serait pas
nécessaire ou approprié d'imposer plus de 200 pages de réglementations
détaillées à cette catégorie de techniciens et mécaniciens aéronautiques.
9) Cette question a été identifiée par l'AESA comme un problème
sérieux il y a plus de huit ans, à la suite de quoi l'AESA a établi un groupe
de travail pour traiter cette question et a publié ses termes de références le
2 novembre 2011 (Annexe 3). Les termes de référence définissaient le
problème à résoudre et énonçait comme l'un des objectifs la nécessité de « clarifier comment le personnel de
soutien doté d’une licence évalue que les tâches d'entretien sont exécutées
selon les normes requises et quel niveau de supervision ils doivent placer sur
le personnel d'approbation ». Les termes de référence identifient « l'absence d'une définition claire du
rôle et des responsabilités du personnel licencié (personnel de soutien B1 et
B2) chargé d’assister le personnel de certification de catégorie C pour
l'ensemble de l'avion dans les organismes de maintenance en base »
comme l'un des problèmes à résoudre. Bien que les termes de références aient
une date cible pour la publication de l'avis au premier trimestre de 2014,
l'avis n'a pas encore été publié à ce jour.
10) Il est clair qu'il est
extrêmement préoccupant que l'AESA ait établi dès 2010 (Annexe 3) que de nombreux accidents se sont produits à la suite d'un
mauvais entretien approuvé par le personnel de certification au moyen d'un
certificat de remise en service basé sur une vérification purement
administrative, plutôt que sur une inspection appropriée. D'après leur propre expérience d’hommes et de
femmes de terrain, les membres de l'AEI (tous des techniciens et mécaniciens aéronautiques licencié(e)s) peuvent
vérifier que, dans certains pays, il est désormais d'usage que les avions
soient remis en service sans vérification, mais simplement en se fiant aux cartes
de travail signées par des techniciens et mécaniciens aéronautiques non
titulaires d'une licence AESA détaillant le travail qu'ils ont effectué.
11) L'AESA a effectué deux audits ad hoc des pratiques de
vérification en Turquie et en Allemagne à la suite de la réception de la lettre
de l'AEI du 28 avril 2015. (Annexe 4).
Turkish Airlines est titulaire d'un agrément AESA Partie-145 qui est
directement contrôlé par l'AESA, ce qui lui confère des pouvoirs d'exécution
qui ne sont pas disponibles dans les pays de l'UE. Au cours de l'audit ad hoc
de Turkish Airlines, l'AESA a établi que les techniques de vérification
inappropriées décrites ci-dessus avaient été adoptées et exigeait de Turkish
Airlines qu'elle remédie à ce défaut, ce qui a maintenant été fait. Cela montre
clairement que l'AESA a l'intention de faire en sorte que les travaux
d'entretien, par opposition aux cartes de travail signées, doivent être
vérifiés par le personnel de certification.
12) En ce qui concerne l'Allemagne, les mêmes procédures de
vérification inadéquates ont été approuvées par le Luftfahrt Bundesamt allemand
(« LBA »). Le LBA continue d'approuver ces procédures même si elles
ont été auditées par l'AESA le 30 juin 2015, ce qui aurait dû aboutir à une
constatation qui aurait dû être de niveau 1, exigeant une action immédiate dans
un délai de deux semaines, car elle affecte la sécurité pour chaque remise en service
délivrée en Allemagne. Tout le moins, elle aurait abouti à une constatation de
niveau 2, exigeant une action dans un délai de 12 mois, faute de quoi l'AESA
est tenue de signaler l'affaire à la Commission Européenne (CE) : Article
17 du Règlement UE 628/2013, (Annexe 5).
Il est très alarmant à propos d'un audit effectué en 2015, qu'il existe une
constatation ouverte sur cette question qui ne peut que signifier que le LBA
n'a pas corrigé ses procédures. L'AESA n'a pas signalé ce problème à la CE dans
les 12 mois suivant l'audit et enfreint donc l'article 22 du règlement
628/2013.
13) L'Annexe 10
représente la correspondance entre l’AEI et l'Inspectie Leefomgeving en
Transport (« ILT ») des Pays-Bas, qui résume la manière dont
certaines autorités aéronautiques cherchent à justifier leur dérogation aux
exigences de l'AESA. L'ILT indique que « le
régulateur a utilisé le mot vérifier ici, alors qu'à d'autres endroits dans les
règles de mise en œuvre, une formulation plus stricte est utilisée. Vérifier
donne à l'organisation la flexibilité nécessaire pour concevoir un processus
sur mesure pour l'organisation ».
Il est clair que le sens du mot vérifier n'est pas moins strict que les
autres termes utilisés dans le règlement, qu'il appelle à l'inspection du
travail plutôt qu'à la vérification des documents et que cela correspond à
l'avis de l'AESA.
14) Le système
de gestion de la sécurité concernant l'entretien des avions établi par le
règlement CE susmentionné et mis en œuvre par l'AESA est admiré et largement
suivi dans le monde entier. Toutefois, le fait que l'AESA opère en tant
qu'autorité de surveillance dans les juridictions de l'UE mais n'a pas le
pouvoir d'appliquer ses réglementations, même lorsque, par audit, elle constate
des violations par des États individuels, fait de l'AESA un régulateur sans
pouvoir. Cette impuissance a permis aux autorités nationales de réinterpréter
les réglementations et les résultats des audits de l'AESA d'une manière qui
déroge sévèrement à l'intention et aux objectifs clairs du règlement de l'AESA,
de sorte qu'au lieu d'un ensemble unifié de réglementations en Europe, il
existe un patchwork de règles différentes prétendument conformes à un ensemble
unique de règles mais reflétant en réalité des normes significativement
différentes. L'AESA avait clairement l'intention de faire en sorte que les techniciens
et mécaniciens aéronautiques titulaires d'une licence AESA soient toujours
obligés de s'assurer que le travail effectué par des techniciens et mécaniciens
aéronautiques non titulaires d'une licence AESA a été correctement exécuté.
Certaines autorités nationales ont plutôt autorisé un système dans lequel le
travail des techniciens et mécaniciens aéronautiques non titulaires d'une
licence AESA n'est pas vérifié. La seule chose que ces autorités exigent pour
permettre à un avion de voler après que l'entretien a été effectué, c'est qu'un
technicien et mécanicien aéronautique agréé vérifie que les cartes de tâches
ont été signées. C'est évidemment moins sécurisé que le système créé par l'AESA
et ordonné dans les réglementations qu'ils ont promulgués.
Secrétariat Général de l'Aircraft Engineers International
Secrétariat National de l'UNSa Aérien SNMSAC
|